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Réduction Madelin : prorogation du taux majoré – mise en conformité

Civil - Fiscalité des particuliers
24/01/2020
La loi de finances pour 2020 proroge de 1 an la hausse temporaire de sept points, portant de 18 % à 25 % le taux de la réduction d’impôt sur le revenu, dite Madelin, tout à procédant à divers aménagements, notamment afin de rendre ce dispositif compatible avec le droit de l’Union européenne.
Le dispositif Madelin ouvre droit à une réduction d’impôt sur le revenu au taux de 18 % au titre des souscriptions en
numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de certaines PME dont les titres ne sont pas négociables
sur un marché réglementé (CGI, art. 199 terdecies-0 A).

Prorogation du taux bonifié transitoire
La loi de finances pour 2018 avait prévu une hausse temporaire du taux de la réduction d’impôt de 18 à 25 % pour les versements effectués au titre des souscriptions au capital des PME jusqu’au 31 décembre 2018, dont l’entrée en vigueur était conditionnée par l’accord de la Commission européenne, dès lors que cette réduction d’impôt présente le caractère d’une aide d’État en faveur des PME(L. fin. 2018, n° 2017-1837, 30 déc. 2017, JO 31 déc., art. 74 ; voir Les Nouvelles fiscales n° 1214, p. 12).

Cet accord n’étant pas encore intervenu, le taux majoré de 25 % n’a donc pas pu s’appliquer jusqu’à présent.

La loi de finances pour 2019 avait prorogé cette hausse temporaire pour les versements effectués jusqu’au 31 décembre
2019 (L. fin. 2019, n° 2018-1317, 28 déc. 2018, JO 30 déc., art. 118 ; voir Les Nouvelles fiscales n° 1237, p. 18). Ce taux majoré n’a pas non plus été appliqué en pour les mêmes raisons qu’en 2018. Aucun versement n’a donc bénéficié de ce taux majoré transitoire.

L’article 137 de la loi de finances pour 2020 proroge à nouveau de 1 an le taux bonifié transitoire, qui demeure
donc applicable aux versements effectués jusqu’au 31 décembre 2020.

Diminution du taux dérogatoire applicable en Corse et en outre-mer
Certains investissements bénéficient d’un taux majoré à 38 % : d’une part, les souscriptions de parts de FIP dont
l’actif est constitué pour 70 % au moins de valeurs mobilières, parts de société à responsabilité limitée et avances
en compte courant émises par des sociétés qui exercent leurs activités exclusivement dans des établissements
situés en Corse (CGI, art. 199 terdecies-0 A, VI ter) et, d’autre part, les souscriptions de FIP dont l’actif est constitué
pour 70 % au moins de titres de sociétés qui exercent leurs activités exclusivement dans des établissements situés
en outre-mer et dans les secteurs retenus pour l’application de la réduction d’impôt dite Girardin industriel
prévue au I de l’article 199 undecies B du CGI (CGI, art. 199 terdecies-0 A, VI ter A).

La loi de finances pour 2020 abaisse ce taux de 38 % à 30 %.

Renforcement de la clause anti-abus concernant les activités financières
Le législateur a progressivement resserré le périmètre des investissements éligibles, en excluant notamment les activités
financières.

Toutefois, le Conseil d’État a réduit la portée de cette clause anti-abus en estimant que l’activité de courtier en assurance revêt un caractère commercial pour l’application de la réduction d’impôt (CE, n° 428692, 9 mai 2019), annulant pour excès de pouvoir la doctrine administrative (BOI-RICI-90-10-20-10, n° 80).

Afin de faire échec à cette jurisprudence, la loi de finances pour 2020 dispose désormais expressément que l’activité
de courtage et l’activité de change sont considérées comme des activités financières.

Encadrement communautaire
La réduction d’impôt est désormais expressément subordonnée au respect des règles relatives aux aides au financement
des risques en faveur des PME, régies par l’article 21 du règlement (UE) n° 651/2014 du 17 juin 2014.

Non-cumul avec d’autres avantages fiscaux
Les titres figurant dans un plan d’épargne en actions (PEA), un compte PME innovation ou dans un plan d’épargne salariale
(PEE, PEI et Perco) n’ouvrent pas droit à la réduction d’impôt.

Les titres figurant dans un plan d’épargne retraite mentionné à l’article L. 224-1 du Code monétaire et financier
sont ajoutés à cette liste.

Aménagement des dérogations applicables aux entreprises solidaires
Le champ des entreprises éligibles à la réduction d’impôt Madelin est réduit s’agissant de l’exercice de certaines activités, notamment financières et immobilières. Toutefois, les investissements au capital d’entreprises solidaires d’utilité sociale (ESUS) définies à l’article L. 3332-17-1 du Code du travail bénéficient de conditions dérogatoires d’éligibilité à la réduction d’impôt, mentionnées à l’article 199 terdecies-0 AA du CGI, soit expressément, soit par renvoi à l’article 885-0 V bis B du CGI, qui concernait l’ISF et qui a été abrogé à compter du 1er janvier 2018.

Tout d’abord, l’exclusion des activités financières n’est pas applicable aux entreprises solidaires (CGI, art. 885-0 V bis B, 1°).
Ensuite, les exclusions relatives à l’exercice d’une activité immobilière ou de construction d’immeubles ne concernent pas les entreprises solidaires exerçant une activité de gestion immobilière à vocation sociale (CGI, art. 199 terdecies-0 AA).

Par ailleurs, les entreprises solidaires ayant exclusivement pour objet l’exercice d’une activité financière bénéficient d’un plafond de versements dérogatoire de 2,5 M€ par an, contre 15 M€ sur l’ensemble de la vie de l’entreprise dans le régime de droit commun (CGI, art. 885-0 V bis B, 4°).

En outre, les entreprises foncières solidaires dans le domaine du logement social ou agricole sont exemptées de plafond de versements, sous réserve de ne pas distribuer de dividendes (CGI, art. 885-0 V bis B, 3°).

Enfin, les entreprises solidaires financières et les entreprises foncières solidaires bénéficient d’une dérogation à la condition d’âge de 7 ans prévue dans le régime de droit commun (CGI, art. 885-0 V bis, 2°).

L’article 137 de la loi de finances pour 2020 modifie la rédaction de l’article 199 terdecies-0 AA du CGI en supprimant tout renvoi à l’article 885-0 V bis B du CGI.

Désormais, les exclusions relatives à l’exercice d’une activité immobilière ou de construction d’immeubles sont applicables aux entreprises solidaires qui n’exercent pas une activité de gestion immobilière à caractère social (CGI, art. 199 terdecies-0 AA, 1° nouveau).

De plus, l’ensemble des entreprises solidaires doivent dorénavant respecter une condition d’âge, portée à 10 ans (CGI, art. 199 terdecies-0 AA, 2° nouveau).

Enfin, les versements réalisés au profit des ESUS, quelle que soit la nature de leur activité, deviennent soumis au plafond général de 15 M€.

Entrée en vigueur
Ces dispositions entreront en vigueur à une date fixée par décret, pris dans les 2 mois de la réponse définitive de la Commission européenne permettant de considérer la réduction d’impôt comme conforme au droit de l’Union. Toutefois, les précisions relatives à la nature financière des activités de courtage et de change, ainsi que l’exclusion des titres figurant dans un plan d’épargne retraite concernent les souscriptions réalisées à compter du 1er janvier 2020.

 
COMMENTAIRE
Dans un contexte marqué par l’extinction de la réduction d’impôt ISF-PME à la suite de la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI), le législateur a prolongé le renforcement temporaire du dispositif Madelin, afin de ne pas fragiliser l’industrie française du capital-risque tout en aménageant certains éléments afin de le rendre pleinement compatible avec les règles européennes en matière d’aides d’État
Source : Actualités du droit