Retour aux articles

Refus de transmission d’une QPC relative à l’immunité des États étrangers

Civil - Procédure civile et voies d'exécution
07/10/2019
La Haute juridiction, considérant que l’article L. 111-1-3 du Code des procédures civiles d’exécution prévoyant la renonciation par un État étranger à son immunité d’exécution n’est pas applicable au cas d’espèce, refuse de transmettre la question aux Sages.
À titre liminaire, l’article L. 111-1-3 du Code des procédures civiles d’exécution, issu de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 (JO 10 déc.), prévoit que « Des mesures conservatoires ou des mesures d'exécution forcée ne peuvent être mises en œuvre sur les biens, y compris les comptes bancaires, utilisés ou destinés à être utilisés dans l'exercice des fonctions de la mission diplomatique des États étrangers ou de leurs postes consulaires, de leurs missions spéciales ou de leurs missions auprès des organisations internationales qu'en cas de renonciation expresse et spéciale des États concernés ».

En l’espèce, en exécution d’une sentence arbitrale du 3 décembre 2000 une société d’import-export, auprès de laquelle un État étranger s’était engagé le 3 mars 1993 à renoncer définitivement et irrévocablement à toute immunité de juridiction et d’exécution, à fait pratiquer une saisie attribution entre les mains d’une banque sur les comptes bancaires de cet État.

Le 6 septembre 2018, la Cour d’appel de Paris donne main levée de cette mesure. La société d’import-export se pourvoi alors en cassation, pourvoi à l’occasion duquel la société sollicite que soit renvoyée au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionalité suivante relative à l’immunité d’exécution des États étrangers : « La portée effective de l’interprétation jurisprudentielle constante conférée par la Cour de cassation à l’article L. 111-1-3 du Code des procédures civiles d’exécution, issu de l’article 59 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, auquel il a été donné une portée rétroactive en l’appliquant à des mesures d’exécution entreprises avant son entrée en vigueur, sur le fondement d’un contrat antérieur, méconnaît-elle le principe de séparation des pouvoirs, le droit de propriété, le principe de liberté contractuelle et de sécurité juridique, ainsi que le droit d’obtenir l’exécution d’une décision de justice, garantis par les articles 2, 4, 16 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ? »

Le non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel est prononcé par la Haute juridiction. La Cour fait référence à deux arrêts de janvier 2018 pour rappeler qu’une « mesure conservatoire portant sur des comptes bancaires ouverts par l’ambassade en France d’un État étranger, affecté à l’exercice de sa mission diplomatique, ne peut être pratiquée qu’autant que cet État a renoncé expressément et spécialement à son immunité d’exécution ». Ces deux jurisprudences n’ont pas fait une application rétroactive de l’article L. 111-1-3 du Code des procédures civiles d’exécution.

Le 2 octobre 2019 la Cour de cassation, pour refuser de transmettre cette question au Conseil constitutionnel considère que « la disposition critiquée [l’article L. 111-1-3] n’étant pas applicable au litige, il n’y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel. ». En effet selon la Cour, « le visa de ce texte se borne à conforter, dans la situation particulière, l’application des articles 22 et 25 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961 et des règles du droit international coutumier relatives à l’immunité d’exécution, des États étrangers ».
Source : Actualités du droit